Avant j'avais peur de tout .
Même quand ma Poup me disais que j'avais quand même peur de beaucoup de choses, je disais que non....pas tant que ça.
Elle avait pourtant bien raison.
Il y avait un berger allemand dans l'immeuble où j'habitais et avant de sortir de chez moi je regardais par la fenêtre pour voir si je risquais de le croiser. J'ai aussi souvent entrebaillé la porte de l'ascenseur avant d'en sortir pour scruter, tellement j'avais peur des chiens. Des chiens des autres puisque j'avais déjà le mien..........La phobie, si irrationnelle et déraisonnable.
J'avais peur de sortir de chez moi, de croiser des gens que je connaissais, de me retrouver dans une foule . Si par malheur je devais faire la file d'attente au supermarché, je devais me concentrer très fort pour ne pas m'évanouir en cédant à la panique.
J'étais totalement incapable d'envisager le concept d'"aller se promener seul".
Incapable d'être SEULE dans un endroit où je n'avais rien à faire. Incapable de faire du shopping seule par exemple. Car rien ne justifiait ma présence en ces lieux. Je n'avais même pas assez confiance en moi pour déambuler seule dans la rue sans une mission précise, aller acheter du pain par exemple. Dans ce cas là, ça pouvait aller, puisque ma présence parmi les humains était justifiée.....
Alors le problème des sorties. Aucune vie sociale bien sûr, beaucoup trop peur des autres, de les voir et bien pire, d'être vue.
Peur de ne pas être transparente et tout faire pour l'être.
Se croire dans l'incapacité d'avoir des relations sociales normales, de s'amuser.
Peur suprême de perdre le contrôle. Alors aucun alcool, surtout ne pas se laisser aller.
Peur du sang d'un coup, alors que j'étais en médecine. Très sympa les crises de panique dans l'amphi et les fuites en courant à la vue de diapos de cadavres.
J'avais peur de demander l'heure dans la rue.
Peur des inconnus.
Aucune assurance.
Peur des gens de mon âge surtout, les normaux, versus moi, l'anormale.
Vertige exacerbé, peur du vide incontrôlable.
Petites craintes présentes depuis toujours transformées en phobies handicapantes.
D'un coup d'un seul.

C'était il y a 4 ans.
Je n'ai plus peur aujourd'hui.
J'ai toujours le vertige, je me méfie des chiens, je n'aime pas le sang, j'arrête de manger quand je stress ou que j'angoisse. Mais JE N'AI PLUS PEUR d'exister et d'occuper une place.
Mais le plus important, c'est que je n'essaye pas de le prouver, et je m'en suis rendue compte en descendant du ring......
J'ai découvert par hasard que depuis 4 mois je vais dans un club de boxe où je n'existais absolument pas aux yeux des boxeurs. J'étais transparente. J'en avais conscience et ça me faisait rire.
Par contre, depuis que je suis montée boxer sur le ring, ils me parlent et me saluent. J'ai gagné leur respect, je ne suis plus invisible.
Et je me sens fière, pas de les avoir impressionés, pas d'être devenue crédible à leurs yeux en quelques rounds, mais de l'avoir fait pour moi.
Sans penser une seconde que des gens allaient me voir, incapable, débutante, de sexe féminin, sur ce ring. Sans avoir peur des autres une seconde. Sans me demander une fois si j'avais le DROIT d'être là.
Toutes ces années que je n'ai pas vécues.
Ce temps perdu.

Tu avais raison Poup. J'avais vraiment peur de tout.